Le labyrinthe du référendum grec

labyrintheLe processus du referendum en Grèce est lancé. Il n’y a donc pas de possibilité d’annulation ou de report comme d’aucuns auraient espérer. De plus le premier ministre grec a confirmé mercredi 1er juillet son appel à voter NON, clarifiant ainsi sa position de manière définitive. Cette initiative inattendue repose soudainement la question démocratique au cœur de la crise politique qui divise l’Europe actuellement autour du problème grec. Mais dans le même temps elle pose aussi une série de questions pour l’observateur extérieur auxquelles j’essaierai de répondre ici.

Un résultat incertain
Le résultat du référendum est très difficile à prévoir. Les premiers sondages donnaient au NON une large avance. Depuis la fermeture des banques et les problèmes causés par le contrôle de capitaux cette avance s’érode. Les initiatives que Tsipras a entrepris cette semaine, avec l’envoi d’une lettre aux institutions acceptant une grande partie de leurs propositions, et les déclarations contradictoires de ses ministres ont probablement aussi entamé la dynamique du NON car elles non pas été comprises ni par les membres de Syriza ni par une grande partie de la population.

Mercredi il y a même eu la publication d’un sondage commandé par BNP Paribas (!) donnant le OUI gagnant. (Depuis la société de sondages en question a démenti l’exactitude des chiffres fuités. Encore un exemple de tentative de manipulation qui a bien fonctionné puisque ce “sondage” a été repris en masse y compris dans les médias français, pe. ici). Deux sondages publiés vendredi 3 juillet donnent des résultats contradictoires (l’un pour une victoire du NON, l’autre pour le OUI) mais très serrés.

Au niveau des organisations politiques, à part Syriza et son allié de droite souverainiste ANEL, ceux qui appellent à voter NON sont les néonazis d’Aube dorée et les organisations d’extrême gauche opposé à l’UE (Antarsya, Plan B etc.). Là aussi il y a des défections puisque quatre députés d’ANEL ont déclaré vouloir aller à l’encontre de la ligne du parti, ce qui créé de fait une brèche importante au sein du camp du NON (et accessoirement à la majorité de Tsipras). Enfin, le parti communiste grec, le KKE, appelle à l’abstention pour éviter de se trouver du même côté que les « réformistes » de Syriza.

Sont clairement pour le OUI la Nouvelle démocratie (droite) et le Pasok, anciens alliés au gouvernement, ainsi que le parti libéral du centre droit To Potami. Un argument avancé par la députée de ce parti Antigone Lyberaki résume bien leur pensée : pour elle il faut que les classes moyennes votent OUI parce que « les pauvres, dans des conditions critiques, font les mauvais choix ».

On sait que le NON recoupe la sociologie des électeurs de Syriza (plus jeunes, actifs, urbains) alors que les supporteurs du OUI se concentrent parmi les classes privilégiées et les électeurs de plus de 55 ans, notamment les retraités. Néanmoins, il faut aussi comprendre que le camp du OUI n’est pas complètement homogène. On y trouve notamment des couches de jeunes professionnels, très diplômés, europhiles et d’obédience libérale (politiquement et économiquement) aux côtés de l’establishment partisan qui a géré l’État grec pendant 40 ans dans l’opacité, le clientélisme et la corruption.

Les premiers ne sont pas forcement contents de se retrouver aux côtés du second pour soutenir l’austérité mortifère mais considèrent qu’il s’agit d’un moindre mal par rapport à une sortie potentielle de la zone euro et/ou de l’UE, hypothèse qui dépasse leur entendement.

Des bonnes intention mais une stratégie erratique

L’idée de valider une stratégie radicale par un referendum n’est pas nouvelle. Elle circule depuis l’accord préliminaire du 20 février entre la Grèce et ses créanciers, considéré pour beaucoup comme un échec du gouvernement. Néanmoins cette décision a été prise le vendredi 26 juin par Tsipras, apparemment sous l’impulsion de Yanis Varoufakis, en raison de l’impasse politique dans laquelle celui-ci s’est trouvé.

Ayant fait toutes les concessions qu’il était possible de faire, voire davantage, Tsipras a pris conscience que le camp des créanciers étaient complètement dominé par le « parti allemand » qui, sous l’impulsion notamment de Wolfgang Schaüble, impose ses vues de manière implacable. Et son objectif est clair : évincer Syriza du pouvoir et/ou la Grèce de l’euro.

Il n’y avait donc pas lieu d’espérer un « compromis honorable », ce qui était la promesse de Tsipras. Du coup le referendum s’est imposé de lui même comme un moyen de renforcer la position de négociation grecque (si le NON l’emporte), ou alors de valider démocratiquement une capitulation en rase campagne.

Ceci dit nombre de proches de Tsipras, comme le vice-président du gouvernement Yannis Dragasakis, demeurent pour le moins sceptiques sur le choix du referendum, d’où une certaine impression de tergiversation et d’improvisation de la part du gouvernement ces dernières 48 heures. On peut supposer également que les tensions et les tiraillements sont nombreux au sein de l’équipe sous pression en charge de cette affaire (Tsipras, Dragasakis, Varoufakis, Papas, Tsakalotos et quelques autres).

On peut aussi se poser légitimement la question de savoir si le referendum n’aurait pas du être proposé plus tôt. On aurait évité ainsi qu’il ait lieu dans un contexte très tendu pour le système bancaire (contrôle de capitaux, fermeture des agences etc.) pouvant provoquer un sentiment de panique dans une partie de la population avec des effets néfastes sur la dynamique de la gauche. Cependant, pour le gouvernement grec il s’agit d’un choix contraint plutôt que d’une réelle stratégie mûrement réfléchie.

Les effets économiques du référendum

Les effets à l’intérieur de la Grèce sont d’abord liés à la panique qui a gagné une partie de la population, renforcée par l’impréparation relative des services de l’État ainsi que des établissements bancaires. Ainsi, mercredi 1er juillet tous les retraités n’avaient toujours pas touché leurs pensions pourtant dues depuis ce week-end.

De même, dans de nombreux endroits isolés du pays, comme dans certaines îles des Cyclades, les distributeurs automatiques étaient vides hier et l’utilisation des cartes bancaires était également difficile. Il faut ajouter à cela la ruée, irrationnelle, vers les supermarchés et les stations d’essence de ce weekend qui a renforcé une logique de cercle vicieux : un sentiment d’urgence renforçant la pression sur le système bancaire et sur l’économie.

Dans le même temps l’impact de la cette crise est important également à l’étranger. Ainsi lundi et mardi les bourses européennes ainsi que Wall Street ont accusé des pertes importantes à cause de l’incertitude liée au problème grec. Le spread de l’Italie, différence entre le taux d’emprunt de ce pays avec le taux d’emprunt allemand, a considérablement augmenté. Des attaques spéculatives vers les pays considérés comme étant les maillons faibles de la zone euro, notamment l’Italie et la France, ne sont pas à exclure dans les jours qui viennent.

Les effets politiques du référendum en Grèce

Au niveau politique les conséquences en Grèce sont mitigées. D’un côté la décision de Tsipras de proposer un referendum a donné une forte impulsion au peuple de gauche. On a vu ainsi une foule dense remplir de nouveau la place Syntagma après quatre mois d’attente, ressemblant les militants de Syriza mais aussi de toutes les forces de gauche, à l’exception du parti communiste. Mais le referendum a également activé les réflexes de la droite, voire de l’extrême droite, et de la petite bourgeoisie qui a manifesté massivement son attachement à l’euro et ceci, apparemment, à tout prix.

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L’image du vieil homme qui pleure à l’Une de ce tabloïd grec censé représenter un retraité en détresse provient en fait d’un séisme en Turquie d’il y a 16 ans

Le référendum a déclenché également une vague de propagande de la part des médias dominants privés en faveur du OUI. A titre d’exemple, les journaux TV des chaînes nationales privées ont consacré cinq fois moins de temps à la manifestation du 29 juin organisée par les tenants du NON, pourtant plus fournie, qu’à la manifestation du OUI le lendemain. Ils ont également grandement exagéré les difficultés provoquées par la fermeture des banques, notamment pour les retraités. Au point d’utiliser des images qui datent du séisme en Turquie en 1999 pour les illustrer !

Bien entendu, une majorité des Grecs est vaccinée depuis plusieurs années contre cette propagande. Néanmoins, certaines populations, notamment les plus âgées y sont encore sensibles. Le résultat dépendra donc de leur mobilisation.

Les effets politiques du référendum en Europe
Mais peut être que les effets politiques les plus saillants et les plus intéressants à observer du referendum grec se manifestent dans les instances européennes. Le premier fait marquant est la conférence de presse de Jeroen Dijsselbloem suite à la réunion de l’Eurogroupe du 27 juin. En effet, l’Eurogroupe a expulsé le ministre des finances grecques de cette réunion et a produit un communiqué signés par 18 ministres (et non pas 19), ce qui est un fait unique dans son histoire.

Répondant à une question de journaliste pour savoir comment c’était possible de exclure un membre de la zone euro de la réunion et du communiqué, Dijsselbloem a répondu que l’organe réunissant les ministres de la zone euro pouvait faire ce qu’il voulait car il s’agit d’un groupe informel sans règles. La nature profondément arbitraire des décisions de ce groupe sous l’emprise allemande, dont le pouvoir sur les peuples européens est gigantesque, s’est révélé ainsi au grand jour, suscitant la colère (en privée) des ministres français et italien.

C’est cette radicalisation de l’Eurogroupe qui a provoqué une déclaration de François Hollande demandant la poursuite des négociations cette semaine et allant dans le sens inverse d’Angela Merkel qui elle a proclamé la suspension des discussions. Il s’agit de la première réelle divergence rendue publique entre les deux gouvernements qui montre la position compliquée dans laquelle se trouve le président français.

L’argument démocratique inversé
En effet, à cause de sa mauvaise situation économique, la France risque de subir de plein fouet les conséquences d’un Grexit. De plus, étant donné l’histoire récente autour du référendum de 2005 contre le Traité européen, Hollande aura beaucoup de mal à s’opposer au verdict du peuple grec si celui est se porte vers le NON. Ceci d’autant plus que, disposant d’une majorité relativement confortable et théoriquement de gauche, il ne peut invoquer l’argument démocratique à rebours comme le font désormais les Allemands.

En effet, face aux Grecs qui évoquent la volonté démocratique du peuple de mettre fin à l’austérité, le gouvernement allemand utilise désormais le même argument à l’inverse : il soutient qu’un accord qui serait trop favorable à la Grèce ne passerait pas au Parlement allemand. Cet argument est repris par d’autres pays sous influence allemande, comme la Finlande ou la Slovaquie.

Selon des sources grecques c’est cette insistance des ministres au sein de l’Eurogroupe sur la difficulté, réelle ou supposée, de le faire valider par leurs représentations nationales respectives qui a fait capoter la semaine dernière l’accord que les autres acteurs (gouvernement grec, Commission, BCE et même FMI) avaient accepté.

Qu’est ce qui se passera après le referendum ?

C’est évidement la grande question. Malgré l’importance de cette initiative en termes politiques mais aussi au niveau de l’impact médiatique (le sujet fait la Une des médias internationaux depuis plusieurs jours), il n’est pas évident que le referendum bougera les lignes surtout si le NON l’emporte.

Dans cette éventualité, la position de Tsipras dans les négociations sera effectivement renforcée mais ceci ne signifie pas qu’il pourra décrocher des concessions importantes. Déjà les “durs” représentés par Dijsselbloem ont fait savoir qu’une Grèce disant non aux conditions des créanciers n’a pas sa place dans la zone euro.

A moins que la faille entre l’Allemagne et la France s’accentue et le rapport de force interne à l’Eurogroupe change il ne peut y avoir des véritables concessions. Mais la question demeure de savoir si les dirigeants français, italiens etc. veulent véritablement changer la position de l’Europe et, surtout, si ils ont les moyens pour le faire.

En revanche, ceux qui vont tirer un bénéfice politique évident d’une victoire éventuelle du NON sont les militants de l’aile gauche de Syriza et les organisations opposées à l’euro comme Antarsya. Une victoire du NON, quoi qu’en dise Tsipras, fera sauter un verrou politique et psychologique au sein de la population et rendra une sortie de la Grèce de la zone euro encore plus probable. Ceci d’autant plus que le scénario d’un « velvet exit » commence à être discuté à Bruxelles. Il s’agirait d’un divorce « à l’amiable » dans lequel l’UE financerait une sortie ordonnée de la Grèce de la zone euro.

Dans le cas d’un OUI, les choses risquent d’être également compliquées. Quelle sera alors la position du gouvernement ? Yanis Varoufakis a déjà déclaré qu’il démissionnerait refusant de signer un nouveau mémorandum d’austérité. Mais quelle sera la position de Tsipras ?

Ce qui est sûr est que sa majorité risque de voler en éclat, conduisant à des nouvelles élections…mais que Syriza peut gagner de nouveau. Quelle sera alors sa politique ? Est-ce qu’il réussira de à sauvegarder son unité ? Évidemment rendre les armes après seulement six mois serait un très mauvais précédent pour la gauche en Grèce mais également en Europe.

On le voit, le référendum risque de poser plus de questions qu’il apportera des réponses quelque soit le résultat. Une chose est sûre : les souffrances du peuple grec ne font que s’aggraver cinq mois après une élection qui était censé apporter le renouveau et un soulagement pour les plus démunis.

Peut être alors que la seule solution concrète qui restera possible, malgré les risques, est celle de la radicalisation : sortie de la zone euro, éventuellement de l’UE et défaut unilatéral sur la dette. Le seul chemin vers l’émancipation des Grecs ?

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